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En France, 730 000 personnes bénéficient d’une mesure de protection juridique, un chiffre en hausse régulière (notamment pour des raisons démographiques avec le vieillissement de la population), recouvrant des réalités très différentes en termes de profils des personnes protégées, de leur autonomie, de leurs attentes et de celles de leurs proches. Dès lors, s’interroger sur le respect des droits de ces personnes constitue une priorité. La mission d’information sur les droits fondamentaux des majeurs protégés a ainsi été créée par la commission des lois du 17 octobre 2018, et ce rapport d’information constitue la synthèse de leurs recherches et observations.

Un premier axe relève les interrogations liées à la garantie des droits fondamentaux des majeurs protégés. Il revient sur les évolutions introduites par la loi de 2007 et se conclue par une transformation qu’il reste à amorcer. Plutôt que de rechercher l’intérêt supérieur de la personne protégée (ce qui sous-entend que d’autres personnes sont en mesure de savoir quel est l’intérêt de la personne protégée), le rapport préconise de prendre en compte les préférences et choix de la personne, quand bien même cela pourrait aller à l’encontre de la préservation de certains de ses intérêts, notamment financiers. Cela irait dans le sens des préconisations de la CIDPH. Toutefois, le suivi de cette perspective aurait des conséquences pour les mandataires (cela nécessite une importante proximité, une disponibilité, et leur responsabilité peut être engagée si la personne protégée se trouve en difficulté).

Un deuxième axe s’intéresse à la protection des droits fondamentaux en amont de la mesure. Les rapporteurs proposent un encadrement du certificat médical circonstancié, dont il faudrait préciser par décret le contenu pour harmoniser les pratiques des médecins et renforcer le niveau d’information du juge des tutelles. Également, le rapport préconise la mise en place d’une formation initiale et continue pour les médecins. Une approche pluridisciplinaire pourrait aussi être imaginée, en apportant au juge des tutelles des informations sur la situation sociale et pécuniaire de la personne à protéger. Le rôle de l’avocat pourrait être renforcé (en rendant sa présence obligatoire ou en permettant au juge des tutelles d’en désigner un s’il l’estime nécessaire), et les cas où la personne à protéger n’est pas entendue par le juge pourraient être limités et sa présence obligatoire à l’audience pourrait être davantage respectée. Concernant les mesures de protection, le rapport préconise la mise en place d’une mesure unique d’assistance administrative pour les personnes à faibles ressources avec des difficultés de gestion, et le renforcement de la sécurité juridique de certaines mesures, avec des garanties de notaires pour les mandats de protection future par exemple, et en prévoyant un contrôle minimal des habilitations familiales par le juge. Le public doit être mieux informé de ces mesures. Aussi, dans les cas où une amélioration des facultés est envisageable, l’objectif de la mesure doit être le maintien ou le retour à l’autonomie avec un accompagnement adapté. Le département pourrait assurer ce suivi.

Un troisième axe regarde la question des droits fondamentaux pendant l’exercice de la mesure. L’élaboration de règles déontologiques de la profession de MJPM serait une avancée. Cette profession doit également gagner en visibilité et obtenir une voie d’accès universitaire spécifique. Un statut de MJPM dans la fonction publique est à envisager pour pérenniser le rôle des préposés d’établissement et impliquer l’ARS dans la supervision et la coordination de la protection juridique. Concernant les personnes protégées et leurs familles, il faut faciliter leur compréhension des mesures et de leurs implications, en généralisant par exemple les explications en « facile à lire et à comprendre ». L’accès au vote doit aussi être facilité. Sur les aspects médicaux, il est proposé que la personne protégée puisse consentir seule aux actes médicaux dans la mesure où son état le permet, sinon de faire valoir l’avis de la personne de confiance désignée par la personne protégée. Le régime des actes médicaux pourrait évoluer, en autorisant notamment le don du sang des personnes protégées. Le don d’organe du vivant constitue aussi un élément de réflexion. Dans les cas d’hospitalisation sans consentement, le rapport préconise l’obligation d’information du tuteur ou du curateur et son association aux décisions. Pour ce qui concerne les relations avec les banques et administrations, il est proposé que les employés soient formés aux droits des personnes protégées, et que solutions novatrices soient pensées à l’aide d’un groupe de travail. Les personnes protégées pourraient également être en mesure de réaliser certaines démarches seules, comme le fait de porter plainte. Toujours dans une perspective de renforcement des droits, le rapport propose la création d’un défenseur des droits des personnes protégées, qui puisse notamment saisir les équipes du Contrôle général des lieux de privation de libertés (CGLPL) pour des visites de contrôles en établissement entre autres. Il est aussi préconisé de placer les droits fondamentaux au cœur du contrôle administratif des MJPM, et de renforcer les moyens consacrés aux greffes pour le contrôle des comptes de gestion.

Enfin, le quatrième axe expose la nécessité de mettre en œuvre une véritable politique publique de la protection juridique. Cela pourrait commencer par la mise en place d’un point d’entrée unique pour l’ensemble des mesures de protection, grâce à la création de sections spécialisées dans les MDA et MDPH. Des comités de coordination pourraient voir le jour entre les juridictions, les services sociaux du département, la CNSA et les structures d’accompagnement et de prise en charge. Un observatoire de la protection juridique pourrait être envisagé. Dans un objectif de modernisation du suivi des mesures, un registre unique et dématérialisé incluant les mesures de protection et les mesures anticipées – accessibles à quelques catégories de professionnels et strictement encadré – serait un outil intéressant. Aussi, le projet e-MJPM expérimenté dans les Hauts-de-France pourrait être étendu à l’échelle nationale : les magistrats disposeraient d’informations sur l’activité des MJPM permettant d’améliorer la répartition des mesures.

Consultez ici le rapport complet avec l’ensemble des préconisations